DIALLOBEDUCATION

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Hommage au géant africain, l'homme achevé: Mandela l'éternel!

Hommage au géant africain, l’homme achevé : Mandela l’éternel !

Mercredi 3 février 2010, un peu en avance, Madiba comme l’appelle affectueusement les Sud-africains, célébrait en famille, les 20 ans de sa libération de prison. Nelson Rolihlahla Mandela, 91 ans,  avait été libéré de sa geôle de Robben Island à l’extérieur de la ville de Paarl,  près du Cap-Occidental de l’Afrique du Sud. Le 11 février 1990 il marcha un long moment, le poing levé, à travers une foule immense et enthousiaste dans les mains de Winnie Mandela, sa compagne de lutte et épouse. Dans ce lieu il passa la majeure partie de ses 27 ans de prison sous l’affreux régime d’apartheid. Ce fut la date du départ de la démocratisation en Afrique du Sud.  L’homme au grand cœur, « l’homme achevé » comme le dit Mr Abdou DIOUF ancien président du Sénégal ; prix Nobel de la paix, avait donc convié d’anciens membres de la lutte contre l’apartheid, de son parti l’ANC -African National Congress- tels que Cyril Ramaphosa, son ancienne épouse Winnie-Mazikela Mandela, sa fille aînée Zindzi Mandela et son ancien geôlier blanc, Christo Brand.

Le 11 février, les festivités ont été grandioses aux abords de la prison où, sont organisés, une marche de 500 mètres commémorant ses premiers pas d’homme libre. Des danses, des soirées endiablées au son de la musique zoulou et Xhosa ont aiguayé le Lieu. Mais, l’icône de la lutte anti-apartheid, l’homme fier de la tribu Xhosa ou Koza, n’a pas pu participer ; il n’a plus sa force de 20 ans. Winnie Mandela était présente, quant à lui, compte tenu de son âge si avancé, il s’est rendu jeudi soir au Parlement, situé au Cap, où l’actuel président de la République, Jacob Zuma prononçait un discours, sur l’état de l’Union.

Le premier président noir sud africain est élu en 1994, l’élection de Nelson Mandela consacre la fin de l’Apartheid, mais l’Afrique du Sud reste une nation profondément divisée sur le plan racial et économique. Pour unifier le pays et donner à chaque citoyen un motif de fierté, Mandela avait misé sur le sport, et avait fait cause commune avec le capitaine de la modeste équipe de rugby sud-africaine avec un seul pari : se présenter au Championnat du Monde 1995 sous les couleurs d’une nation arc-en-ciel, organiser la coupe du monde de foot-ball. Prions pour lui, pour qu’il assiste à l’ouverture de la coupe du monde de foot-ball de 2010 en Afrique du Sud.

Nelson Mandela, au-delà de l’amour porté aux autres, est simplement un être exceptionnel qui a su faire passer les intérêts d’une nation par rapport aux siens. Qui a fait du pardon son paradigme sociétal. Un exemple dans ce monde globalisé où la haine est un modèle de fonctionnement, une méthode de gestion du bien public. Un monde où, le pardon n’est que de façade. Mandela n’a pas privilégié les noirs au détriment des blancs comme certains auraient pu le faire pour se venger de toutes les exactions.  C’est peu de dire, que les autochtones de ce pays très riche ont subi durant de nombreuses années les brimades, les privations et les déceptions.

Comme le disait François de la Rochefoucauld, « on pardonne tant que l’on aime ». Hélas, la plupart de gens qui se revendiquent humanistes font de la rancœur, leur mode de fonctionnement et, en tant que croqueurs de diamant, exigent éternellement qu’ils soient rétribués. Traditionnellement défini comme un « animal doué de raison », l’homme est donc en mesure de répandre le bien ou le mal autour de lui. Nelson Mandela a préféré la première solution, celle de répandre du bien. Il n’a pas à hésiter à dire que son fils est mort de sida pour informer les hommes dans un continent où le secret est un dogme et où la maladie fait des ravages dans le secret des familles. Un  « Grand homme » ne peut que faire l’histoire, marquer l’Histoire. Pour cela il a bien marqué l’histoire.  

Dans cette problématique liée à l’homme, tout individu est-il en mesure de devenir un grand homme ? Il faut s’inspirer donc de cet homme pour devenir un Grand.  Il reste l’un des rares hommes vivants à faire l’unanimité autour de lui. Et dire qu’il vient d’Afrique ce continent tant décrié et mis au banc des accusés. Y’aurait-il eu Obama aujourd’hui s’il n’y avait pas eu Mandela d’hier? L’histoire de l’Afrique du Sud n’a-t-elle pas précipitée celle des Etats-Unis d’Amérique ? N’a-t-il pas seulement précipité l’histoire, la question mérite bien d’être posée.

Je me souviens, alors que je ne pensais pas le voir vivant trop longtemps devant les menaces du moment, même si j’espérais vivre la fin de l’Apartheid, de ce pays où les noirs n’avaient aucun droit, ni espoir, ce pays « only for whites ». On comprendra alors mon émotion quand le 11 février 1990, le héros, le symbole de la résistance, de tout un continent, celui qui, en refusant de plier ou de négocier, a sapé les fondements d’un régime abject, sortait de prison dandinant sous le poids de 27 ans de privation de liberté. Qui se souvient qu’en ce temps pas si lointain des résistants à ce régime  se « suicidaient » de multiples balles dans le dos ? Ainsi est mort Steven Biko. Cet homme dont les résultats de l’autopsie sont une insulte à la médecine et à l’intelligence. Le régime confiant de l’apartheid, certain de la pérennité de ses fondations se moquait du monde en livrant des résultats d’autopsie grossiers. Je me souviens qu’à l’époque quand on était africain, la République Sud Africaine était l’un des pays dans lesquels on n’avait pas le droit de se rendre. Je me souviens que la prise de conscience de l’existence de ce régime m’est venue à la lecture de documents sortis en cachette de ce pays pour informer le monde, des artistes talentueux qui n’ont ménagé aucun effort pour dénoncer l’emprisonnement de Mandela. L’Apartheid avait fait de la république sud africaine une tâche honteuse, une souillure sur le continent africain et sur les consciences du monde. 

Johnny Clegg ! Je le revois virevoltant sur les plateaux de télévision. On l’appelait à l’époque le Zoulou blanc. Il demeure à mes yeux un visage qui montrait que la partition de l’Afrique du Sud cachait des femmes et des hommes blancs qui résistaient de l’intérieur à la négation de la citoyenneté voire de l’humanité à ceux qui étaient de race différente. Il y a eu des hommes comme Donald Woods, ami de Steve Biko, il y a eu bien des blancs qui ont dû s’exiler loin de l’Afrique du Sud parce qu’ils n’acceptaient pas de profiter des privilèges réservés aux blancs que leur offrait le régime, tandis que des déclassés de fait perdaient la vie, l’espoir et des membres de leurs familles dans les ghettos de Soweto et d’ailleurs. Il y avait de jeunes blancs qui refusaient de faire l’armée pour ne pas servir de meurtriers au service des maîtres du régime.

Johnny Clegg était pour moi et pour tant d’autres sûrement l’antidote au manichéisme racial dans lequel il est facile de tomber en réponse à l’abjection d’un régime raciste. Merci à ces hommes et femmes qui ont offert ces visages de la résistance blanche à l’Apartheid nous permettant de ne pas rejeter les hommes en retour. 

Faisons un voyage dans un passé pas si lointain pour nous remémorer ce qu’était l’Apartheid. Ce mot afrikaner ou néerlandais emprunté du français, signifiant « le fait de tenir à part » est une politique de ségrégation raciale mise en place à partir de 1948 en Afrique du Sud par le Parti National Afrikaner, et ne fut abolie que le 30 juin 1991. 

La doctrine de l’apartheid s’articule autour de la division politique, économique et géographique du territoire sud-africain et de la population sud-africaine répartis en quatre groupes ethniques distincts : Blancs, métis, Bantou, Indiens avec la primauté de la communauté blanche. Par extension, le terme peut également désigner toute politique de ségrégation.  La politique d'apartheid est l'aboutissement du nationalisme afrikaner débuté dès la fin du XVIIème siècle, magnifié par le Grand Treck et la guerre des Boers. Il s'agit pour les Afrikaners d'asseoir définitivement le contrôle de leur communauté sur l'ensemble de l'Afrique du Sud.  En tant que minorité raciale, les Afrikaners sont cependant la communauté blanche la plus importante du pays. La politique d'apartheid a été pensée d'abord via le seul prisme des intérêts de leur communauté avant d'y englober les seules autres communautés blanches du pays. 

Est-il besoin de redire que ce régime était immonde ? En revisitant ces lois je suis consterné et en même temps je me dis que même un régime démocratiquement élu peut engendrer des choses innommables. En regardant quelques unes de ces lois intolérantes et intolérables je ne peux que m’incliner respectueusement devant ceux qui ont renversé ce régime par la résistance intérieure et extérieure et sans véritable violence.

Merci à la grande Miriam Makeba qui a porté dignement et douloureusement par un exil forcé en Guinée la résistance à l’indigne apartheid. Merci aux visages connus et inconnus de la résistance. Merci à ceux qui n’ont cessé de permettre à la voix des opprimés de traverser les barbelés derrière lesquels étaient retenues les espérances d’enfants noirs des ghettos de Soweto. Merci à Desmond Tutu et aux autres et merci à mon héros, Nelson Mandela dont le sourire malicieux et les yeux rieurs me rappellent que la vie triomphe de la mort, la liberté de la prison, l’espoir des désespérances. Madiba Mandela Nelson, héros contemporain, visage de la dignité de la grandeur et de l’humilité, visage d’un combattant des temps modernes, vous êtes Eternel. 

Mandela, en sortant de 27 ans de captivité fait un discours qui est la répétition de son dernier discours lors du procès de Rivonia « J’ai lutté contre la domination blanche et j’ai lutté contre la domination noire. J’ai rêvé d’une société libre et démocratique, où tout le monde vivrait en harmonie avec des chances égales. C’est un idéal pour lequel je veux vivre et que je veux réaliser. Mais s’il le faut, c’est aussi un idéal pour lequel je suis prêt à mourir ».

Mandela reprend ses derniers mots d’homme libre pour se les réapproprier en homme de nouveau libre. Les vingt-sept années n'ont pas flétri l'idéal qui l'a conduit à renoncer à la liberté. La reprise de ce discours, cette réappropriation de ses propres mots après avoir subi les pires privations et des traitements odieux du régime de Pretoria n’est pas anecdotique mais une réalité, une sincérité. Dans une population sud africaine noire assoiffée légitimement de vengeance Monsieur Mandela rappelle que la lutte qui l’a conduit en prison est contre la domination blanche et aussi contre la domination noire. Vingt-sept ans de vie volée plus tard, Nelson Mandela, celui dont la porte de prison portait le numéro 46664 est prêt à donner sa vie pour qu’aucune race ne domine l’une sur l’autre. L’exemple dépasse l’entendement et même la raison.

Nelson Mandela, en accord avec ses principes et dans un respect scrupuleux de sa parole n’a été président que le temps d’un mandat et il est retourné à la vie civile laissant dans son sillage un respect qui ne passe pas. C’est un exemple pour beaucoup de présidents africains qui n’hésitent pas à vouloir rester au pouvoir toute une vie durant en accumulant mandat sur mandat même à plus de 90 ans.

Aujourd’hui, âgé de 91 ans, le combattant pour la dignité de l’homme n’a pas désarmé. Il a pris à bras le corps un autre combat. Combat contre un mal qui a infecté environ 22% de la population de son pays par le HIV. Dans un monde et plus particulièrement sur un continent sur lequel le tabou du sida est encore très prégnant, il a brisé la loi du silence en 2002 en confiant que trois membres de sa famille étaient séropositifs. Il y a deux ans, ce mal terrible a emporté l’aîné de ses fils. Ecoutez les mots du combattant qui prend le pas sur le père éprouvé et déclare le lendemain de la mort de son fils « il faut rendre ce virus public et ne pas le cacher, parce que la seule façon de le considérer comme une maladie normale, comme la tuberculose ou le cancer est d’en parler et de dire que quelqu’un est mort à cause du sida. Et les gens arrêteront de le voir comme quelque chose d’extraordinaire ». Mandela sublime sa douleur pour embrasser celles de toutes les autres familles marquées par la maladie. Il fait part de sa douleur intime pour briser le joug de la honte et participer à rendre au malade, à l'humain la dignité que lui refuse la maladie, et le regard que l'on porte sur celle-ci. Pour ce geste si noble vous méritez le respect de tout un monde.

Aujourd’hui, le combat pour la dignité de l’homme qu’a porté Nelson Mandela est celui de la dignité des malades du sida et de leur accès aux soins. Il a épousé ce combat avec une telle conviction qu’au travers de la fondation qui porte son nom, il récolte des fonds de par le monde pour mener à bien ce combat. La conviction de l’homme, l’importance de ce combat, la place qu’il lui donne est telle que Nelson Mandela a donné à sa campagne de sensibilisation sur le sida le numéro de sa cellule de prison, le n° 46664.  En revisitant sa vie et ses combats, même de manière sommaire je me dis que mon cœur ne s’est pas trompé en tombant en admiration devant cet homme. Mes respects à cet homme dont le sourire plein de vie est à lui seul un message d’espoir pour ceux qui sont encore retenus ça et là dans des chaînes de servitude physique et/ou mentale. Nelson Mandela vous êtes un héros de notre siècle. Je me fais plaisir à rappeler certaines idées de liberté chérie. En tant qu’africain je peux prononcer les mots «liberté, dignité et égalité». Oui je peux c’est bien à cause de vous.

« Etre libre, ce n’est pas seulement se débarrasser de ses chaînes ; c’est vivre d’une façon qui respecte et renforce la liberté des autres. »

“Je ne suis pas vraiment  libre  si je prive quelqu’un d’autre de sa liberté. L’opprimé et l’oppresseur sont tous deux  dépossédés de leur humanité.”

“Un homme qui prive un autre homme de sa liberté est prisonnier de la haine, des préjugés et de l’étroitesse d’esprit.”

« Pour faire la paix avec un ennemi, on doit travailler avec cet ennemi, et cet ennemi devient votre associé. »

Amadou DIALLO

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12/02/2010
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