DIALLOBEDUCATION

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La Balkanisation de l’Afrique n’est pas une frontière infranchissable.

La Balkanisation de l’Afrique n’est pas une frontière infranchissable.

Depuis l’indépendance des pays africains dans les années 60, beaucoup d’intellectuels dits
« panafricanistes » ont souligné que la balkanisation de l’Afrique
était un mauvais héritage de la colonisation. Beaucoup d’ailleurs parmi eux avaient même estimé que l’Afrique était « mal partie » en maintenant les frontières issues de la colonisation en l’état. Rien n’y fut fait, l’Afrique est restée ainsi morcelée en plusieurs micro-états. Nos premiers dirigeants ont eu alors la lourde tâche de vouloir créer des nations dans des états où se côtoyaient plusieurs ethnies qui se chevauchaient entre plusieurs frontières.

Employé à tort et à travers dans les médias et les déclarations politiques puis repris sans remise en question dans les discussions portant sur le tracé des frontières Africaines
et les modifications que celui-ci impose, le terme de balkanisation fut inventé
en 1918 par l’Allemand Walther Rathenau. Contrairement à ce que l’on peut
penser, il ne renvoie pas à la situation résultant de l’explosion de la Yougoslavie dans les années 1990 mais au contexte politique des premières
décennies du XXème siècle. A une époque où l’empire Ottoman est en pleine
décrépitude, les différentes ethnies peuplant ses possessions sont prises d’un
fort sentiment nationaliste et indépendantiste; la Grèce a déjà quitté l’empire
en 1821, la Serbie et la Bulgarie en 1878, la Roumanie en 1877 et enfin la
Macédoine et l’Albanie en 1912-1913 quand la Turquie envisageait clairement la
dissolution de l’empire Ottoman afin de lui substituer un Etat-Nation Turc.

Les Nations nouvellement crées deviennent alors l’enjeu d’une lutte pour l’hégémonie
Balkanique opposant au cours de guerres sanglantes par alliés interposés la
Russie, l’Autriche-Hongrie des Habsbourg, la France et ce qui deviendra plus
tard la Turquie. La situation est cependant résolue avec la fin de la première
guerre mondiale qui voit définitivement s’effacer les puissances turques et
Austro-Hongroises.

En Afrique aussi, on
attribue à tort l’origine de la balkanisation à la conférence de Berlin de 1885
dont est originaire le tracé frontalier contemporain inchangé depuis, sauf exception
faite de l’Érythrée indépendante en 1993 et du Sud-Soudan en 2011. Pourtant,
ces frontières sont loin de faire l’unanimité mais personne n’entend
explicitement les modifier. Objectivement, elles sont loin de donner à
l’Afrique une allure balkanique car si l’on compare les deux régions on voit
que les Balkans avec leur superficie de 778 415km² comprennent 12 Etats tandis
que l’Afrique avec un peu plus de 30 000 000km² n’en comprend que 54 états le
Sud-Soudan compris. Le continent Africain est 38,8 fois plus grand que la
péninsule Balkanique et il faudrait alors 466 Etats indépendants pour que
celui-ci ait une configuration politique similaire. On en est bien très loin du
quota!

La méthode employée
afin d’établir la domination coloniale en 1885 fut tout à fait inverse, elle
consista en la destruction des petites poches d’unité ethnique afin de les
assembler en grandes entités complètement désunies, de cette situation le
colonisateur put renforcer son pouvoir en s’appuyant sur l’ « indirect
rule », principe visant à favoriser une ethnie ou caste particulière
inféodée à son hégémonie pour que celle-ci soit le bras droit de sa domination
et ainsi miner toute solidarité interne. Cela est renforcé par le fait qu’au
moment où s’impose l’ordre de Berlin, certains peuples entretiennent des
relations similaires à celles que pouvaient entretenir la France et l’Allemagne
au sortir du premier et du second conflit mondial.

Le mythe de la
balkanisation est le corollaire d’un autre mythe prétendant qu’avant la
colonisation, l’Afrique était un ensemble politiquement et culturellement
homogène, certains vont même jusqu’à accuser la colonisation d’avoir créé les
ethnies ! Or ce  qu’elle a créé, ce sont
des territoires et des sous territoires. On a tracé d’une façon arbitraire des
frontières à la règle et au compas sans respect de la volonté des indigènes.
Malheureusement les Africains y tiennent c’est la situation paradoxale dans
laquelle le colonisé tombe amoureux de sa colonie, ce que l’on appelle
communément le syndrome de Stockholm.

Pour les nations issues
de la colonisation, le territoire et l’héritage colonial sont effectivement les
seuls éléments d’identité nationale ce qui entraîne une véritable
balkanisation, celle-ci n’est pas continentale comme on peut le prétendre mais
interne à ces Etats et c’est par l’intermédiaire d’Etats naturellement
balkaniques que le néo-colonialisme s’exerce. Et depuis 1885, rien n’a
fondamentalement pas changé, ce sont toujours les mêmes territoires qui sont
assignés aux mêmes fonctions économiques, la dépendance est toujours la même et
les frontières sont toujours les mêmes. Sur les plans sociaux et sociétaux, l’Afrique
va de mal en pis et lorsque j’entends dire que « les africains sont plus bêtes
que la moyenne en étant incapables de s’unir entre personnes du même pays » je
n’ai qu’une chose à répondre, ils ne sont pas bêtes mais humains. Ils ne sont
pas du bétail qui s’identifiera à son enclos mais des hommes attachés à leurs
cultures et tant que l’on niera leur humanité ils continueront de s’enfoncer
dans la sauvagerie et la division.

Dans un contexte de
crise ivoirienne où la partition s’impose de plus en plus comme la solution de
sortie, on voit bien que l’attitude diverge selon les tendances, là où le
populiste Laurent Gbagbo, bien décidé à rester au pouvoir résigné à l’idée
qu’il n’aura jamais le contrôle du nord du pays ce qui constitue dans les faits
une partition officieuse, le néo-colonialiste ADO est lui déterminé à exercer
son pouvoir sur une Côte d’Ivoire entière et il n’est pas étonnant qu’Henri de
Raincourt, porte-parole de la diplomatie française en soutien à Ouattara
s’exprime ainsi : « S`il devait y avoir une division de la Côte
d`Ivoire, après le Soudan, cela pourrait remettre en question bien des situations
sur le continent, et conduire à une balkanisation, à une ethnicisation de
l`Afrique, ce qui n`est pas la meilleure façon pour elle d`aborder le XXIe
siècle ».

La question qui vient
de se poser est la suivante étant donné la nature du personnage qui l’amène.
Pour qui la « balkanisation et l’ethnicisation de l’Afrique n’est-elle pas la
meilleure façon d’aborder le XXIème siècle ? Les Africains ou bien la
communauté internationale ? En réponse, on peut dire que dans l’intérêt des
Africains il est nécessaire de ne pas aborder le XXIème siècle comme s’est
terminé le XXème.

 Un territoire ne fait pas une nation et il est
plus qu’urgent de rompre avec l’ordre de Berlin, car la balkanisation de
l’Afrique n’est pas une frontière infranchissable. Ceci dépend de la volonté de
ceux qui dirigent. Si on veut que l’Afrique soit le centre des intérêts
économiques et sociaux du monde, il est temps de s’unir dans des ensembles
beaucoup plus larges. La richesse de l’Afrique en matières premières finira par
faire attraction à tous les vautours de tous bords. Notre intérêt est rompre
ses frontières artificielles seul gage de notre indépendance définitive.

Amadou DIALLO

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29/05/2011
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