"Black Blanc Beur en 1998, Bananes en 2010" France (1-2) Afrique du Sud
« Black Blanc Beur en 1998, Bananes en 2010 » : France (1-2) Afrique du Sud.
L'équipe de France de football quitte la Coupe du monde 2010 dès le premier tour de la façon la plus désastreuse. Réduits à dix après une demi-heure de jeu, les Bleus n'ont pas eu le sursaut d'orgueil que les supporters attendaient des coqs gaulois. Ce mardi 22/06/2010, ce qui aurait pu être l’absolution d’une épopée catastrophique a viré au cauchemar. Les chances de l’équipe de France d’atteindre les huitièmes de finale étaient certes minces mais le pays tout entier espérait au moins voir les Bleus finir sur une victoire nette sur les « jaunes » d’Afrique du Sud.
Les supporters qui n’avaient pas boycotté le match auront prié, chanté et espéré jusqu’à la 20e minute de jeu. Sur un corner sud-africain, le gardien français, Hugo Lloris, rate sa sortie. Au deuxième poteau, Bongani Khumalo se charge d’inscrire le premier but pour les Bafana-Bafana. C’en était fini des derniers espoirs français de se qualifier pour le tour suivant. Six minutes plus tard, l’arbitre achève l’équipe de France en sortant un carton rouge contre Yoann Gourcuff pour un coup de coude jugé très dangereux.
Réduite à dix, la formation tricolore s’inclinera une deuxième fois sur une frappe de Katlego Mphela. Complètement dans les nuages, malgré la blancheur de la lune qui illuminait le terrain et privée de son meneur de jeu, la France évite de justesse la correction à la 51e minute, lorsqu'une frappe de Mphela s’écrase sur le poteau de Lloris. L'entrée de Thierry Henry, quelques minutes plus tard, ne changera pas grand-chose à la prévisible déroute tricolore.
Le seul rayon de soleil ou rayon de lune du match sera apporté par Florent Malouda, rentré à la place de d'André-Pierre Gignac à la pause, qui réduit le score à la 70e minute, et évite aux Bleus de rentrer en France sans avoir marqué un seul but. En trois matchs disputés en Afrique du Sud, la France n’a eu qu’un seul minable but à son compteur.
Au coup de sifflet final, la France est logiquement éliminée sans combattre. En guise d'épilogue, le sélectionneur français, Raymond Domenech, refuse de serrer la main du sélectionneur des Bafana- Bafana, le Brésilien, Carlos Alberto Parreira, comme si un accord tacite était conclu avec ce dernier et qu’il n’a pas voulu respecté. Un dernier geste qui résume à lui seul l'état de désolation de l'équipe de France, véritable champ de ruines sur lequel le futur sélectionneur, Laurent Blanc, devra reconstruire une formation en mal de discipline et résultats.
« C’est vraiment dommage, a résumé Florent Malouda à l’issue de la rencontre. Vu ce qui s’est passé ces derniers jours, un autre résultat aurait été un miracle. Je tiens à m’excuser auprès des supporters français ». Interrogé sur la mutinerie des Bleus, qui avaient refusé de s'entraîner dimanche, le joueur de Chelsea baisse la tête. « On n’est pas fiers de ce qu’on a fait, explique-t-il. On ne voulait pas salir le maillot bleu ».
« L'équipe de France appartient aux supporters et à personne d'autre, rappelle Patrice Évra, avant d'aborder le comportement de l'équipe des derniers jours. Les Français auront besoin de savoir ce qui s'est passé et pourquoi on est arrivé à ce désastre. Les gens ne connaissent pas encore toute l'histoire ». Cette déclaration augure de sérieuses empoignades les semaines et mois à venir, surtout quand les responsables du football français resserrent les rangs autour d’eux. Le capitaine déchu a par ailleurs précisé que les joueurs de l'équipe de France renonceront à toutes leurs primes et qu’il fera une déclaration dans la semaine et il espère que chacun dira la vérité sur les évènements de l’Afrique du Sud.
La déroute de la génération « Anelka » peut-elle être analysée comme une métaphore des dérives de la société française dans son ensemble? Un débat qui gagne en force, mais risque d’exonérer certains de leurs responsabilités. Pointé du doigt pour sa responsabilité dans la déroute des Bleus, Jean-Pierre Escalettes, le président de la Fédération française de football, a exclu de démissionner dans l’immédiat.
« On est un peu désespérés après tout ça. On rentre tous à la maison et là, nous tirerons les conclusions », estime pour sa part Roselyne Bachelot, la ministre française des Sports, dont l’intervention auprès des joueurs, lundi, n’a visiblement pas eu les effets escomptés mais a enfoncé d’avantage le naufrage du navire footballistique français.
On est passé de la génération « Black Blanc Beur » de 1998 à la génération « équipe de bananes » en 2010. Ce mot, de « bananes », qui a été prononcé sur les ondes de France Info, mardi par un supporter de l’équipe de France, confirme que le débat sportif autour de l’équipe de France vire à la foire d’empoigne sociologique. Ce mot ne qualifie-t’il pas la part importante de joueurs noirs, musulmans ou d’origine étrangère dans cette équipe et qui justifie l’irresponsabilité des responsables de la Fédération française de Football?
Et Eric Zemour de dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas : « Les Noirs ont mis de côté les Blancs et les musulmans convertis : Anelka, Ribéry et Abidal ont imposé leur loi ». Il renchérit que : « Chez ces Bleus-là, la France est un pays de bouffons ». Il oublie seulement de dire que dans ce pays-là, la place des noirs, des arabes et des musulmans ne se jauge que sur la base de leurs trophées sportifs, tout le reste est considéré comme un vol des ressources françaises ou une acculturation de la France.
De la célébration de l’esprit « black-blanc-beur de 1998 » à la mise à l’index de l’ « esprit Anelka » à l’équipe de « bananes », Il est évident que l’équipe de France est imprégnée de la culture banlieue, de la culture «va-t’en guerre », et de celle de l’indiscipline. Un pot-pourri culturel qui aurait un effet désastreux sur les performances des Bleus. On trouve chez les bleus le « refus de l’autorité, et la loi du plus fort » qu’on retrouve exactement dans certaines écoles des quartiers difficiles, et qui serait, en partie, responsable de l’échec scolaire comme de la déroute sportive des bleus.
Une analogie qui serait pour certains un raccourci facile et un amalgame très dangereux. Si la virée sud-africaine tourne à la débâcle, les joueurs pris individuellement « ont tous réussi au plus haut niveau en club à force de travail », pour Emmanuel Davidenkoff, malgré la supposée mauvaise influence des banlieues… Et puis, il faudrait savoir faire la distinction entre image publique et personnage privé selon Xavier Rivoire, journaliste à « France Football ». « Dans l’intimité, Nicolas Anelka est un garçon très timide, très posé », assure-t-il sur France 24.
Enfin, « comment parler de culture banlieue pour des joueurs qui sont depuis longtemps milliardaires »? S'interroge Xavier Rivière. Mais cette glorification supposée du « dieu argent » par les joueurs ne renvoie-t-elle pas à une obsession commune à tous les Français ? « Il n’y a pas de raison pour que l’équipe de France ne soit pas à l’image des Français », et vice-versa, affirme sur France 24, Azouz Begag, ancien ministre délégué à la Promotion et à l’Egalité des chances. « C’est à l’image d’une république bling-bling, arrogante et pervertie par l’argent », renchérit Jean-Marie Brohm. Un parallèle qui paraît surtout opportuniste à certains. « En 1998, les joueurs roulaient déjà en Mercedes et affichaient une certaine arrogance », rappelle Xavier Rivoire.
En fait, cette bronca, ces accusations contre les joueurs peut paraître un peu trop faciles. « La responsabilité, au foot comme à l’école, est d’abord celle de l’encadrement », assure Emmanuel Davidenkoff. Pour certains, la Fédération Française de Football et Raymond Domenech profiteraient par ricochet de ces parallèles avec les dérives de la société pour passer au travers des mailles du filet de la critique pour sauver leur peau et fuir leur responsabilité qui est vive depuis le renouvellement du contrat de Domenech.
En effet, depuis cette date, beaucoup d’évènements répétitifs indiquaient à qui voulait le voir les dérives de l’équipe de France. La déroute de cette coupe du monde 2010, n’est pas seulement la faute des « bananes », des enfants « gâtés » mais celle des responsables qui ne voyaient pas plus haut que leur nombril et de leurs intérêts financiers privés.
Aujourd’hui, il faut se rendre à l’évidence, lever la tête, regarder plus loin et crever l’abcès qui gangrène depuis belle lurette l’équipe de France de football.
Amadou DIALLO
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